CH4: Les argiles

Géologie des argiles Chapitre 4 Propriétés

Chapitre 4 - Propriétés des argiles

Introduction

Les minéraux argileux se caractérisent par trois propriétés principales:

- leur forme et leur surface spécifique;

- leur capacité d’adsorption d’eau et de gonflement;

- leur multiples possibilités d’échanges ioniques.

Forme et surface spécifique

Les argiles se présentent sous trois formes (Fig. 4.1a):

- en flocons, caractérisés par même dimension dans les deux directions et une épaisseur équivalente à 1/20ième de la longueur;

- en lattes, avec une dimension plus longue, épaisseur toujours équivalente à 1/20ième de la longueur;

- en aiguilles, deux dimensions identiques et la 3ième beaucoup plus grande (assez rare).

Figure 4.1a – Forme des particules argileuses (Velde, 1995).

Les argiles sont définies depuis le XIX siècle comme des minéraux de petite taille. Ces minéraux ne sont donc pas identifiables au microscope optique. En fait, la majorité des argiles ont des caractéristiques communes, ce qui justifie à posteriori la définition. La fine taille des argiles leur confère une surface importante par rapport au volume des particules (Fig. 4.1b). La surface relative augmente avec la diminution du diamètre. La surface des argiles est supérieure par rapport à celles de minéraux de même taille mais de forme différente. Le rapport épaisseur/largeur est de l’ordre de 20 pour les argiles. Les propriétés des argiles sont principalement contrôlées par leur surface.

76 Géologie des argiles Chapitre 4 Propriétés

Le tableau 4.1 donnent les valeurs caractéristiques des surfaces des grandes familles argileuses. La surface totale comprend la surface externe, comprise entre les particules argileuses, et la surface interne, correspondant à l’espace interfoliaire (Fig. 4.2). Les smectites ont les surfaces totales maximales: surface Smectites > Vermiculites >>> Illites > Kaolinites = Chlorites.

Figure 4.1b – Forme des particules argileuses (Velde, 1995).

Table 4.1 – Surface spécifique des particules argileuses (Eslinger & Peaver, 1988).

Figure 4.2 – Surface des particules argileuses : interne et externe (Eslinger & Peaver, 1988).

77 Géologie des argiles Chapitre 4 Propriétés

Degré d’hydratation

Le degré d’hydratation varie d’une famille argileuse à une autre. Certains minéraux argileux ont la capacité d’incorporer dans leur structure des molécules d’eau (Fig. 4.3). Cette eau modifie la dimension de la couche en provoquant son gonflement. Ces argiles sont appelées argiles gonflantes (“ swelling clays ” - Tab. 4.2). Les smectites, vermiculites et minéraux interstratifiés offrent des capacités d’expansion beaucoup plus importantes que celles des autres espèces argileuses. L’incorporation d’eau est réversible à la pression atmosphérique et dépend de la température et de la pression de vapeur. Plus l’air est humide, plus l’argile pourra incorporer de l’eau.

Les minéraux gonflants ont une structure de base à 10A. Selon l’hydratation, une couche d’eau de 2.5 ou 5.2A d’épaisseur se développe. Cette hydratation conduit à une augmentation de volume pouvant atteindre 95%. Notons qu’il existe des minéraux comprenant de l’eau adsorbée mais qui n’ont pas pour autant de propriétés de gonflement. Dans un climat à saisons contrastées, la présence de smectites conduit une déstructuration du sol (e.g., vertisols): en été les smectites gonflent; en hiver les smectites se déshydratent et entraînent la formation de larges fissures.

smectitessépiolitepalygorskiteillitechloritekaolinite

Figure 4.3a – Capacité d’adsorption d’eau par les particules argileuses (Velde, 1992 ; 1995).

78 Géologie des argiles Chapitre 4 Propriétés

Figure 4.3b – Localisation de l’eau dans les particules argileuses (Velde, 1995).

Table 4.2 – Classification des argiles selon leurs propriétés de gonflement (Velde, 1995).

79 Géologie des argiles Chapitre 4 Propriétés

Figure 4.4. – Conséquence du gonflement des argiles dans la déstructuration d’un sol (La Nature, 1981).

Charge des surfaces argileuses

Les minéraux argileux se caractérisent par une surface électrique non neutre (Fig. 4.5). Il existe deux types de charge:

(1) une charge permanente ou structurelle liée aux substitutions ioniques (Al3+ pour Si4+ dans T, Mg 2+ ou Fe2+ pour Al3+ dans O), de signe négatif;

(2) une charge de surface variable selon le pH du milieu, liée au réactions chimiques qui se produisent à la surface des minéraux ou suite à l’adsorption de surfactants, de signe + ou -.

(a) Kaolinite: for 1:1 structure, positive ions areattractedtothelight-blue tetrahedralbasaloxygensurface.At the sametime,negativeions areattractedtothe dark-blue octahedral hydroxylsurface.(b) Vermiculiteorsmectite.for 2:1 structure, mostlypositive ions areattractedtothelight-blue tetrahedralbasaloxygensurfaces.

Figure 4.5ab – Adsorption à l’équilibre et échange ionique (Schroeder, 2002).

80 Géologie des argiles Chapitre 4 Propriétés

La charge de surface est liée à l’hydrolyse de liens rompus Si-O et Al-OH le long des surfaces. A faible pH, l’argile se caractérise par une capacité d’échange anionique: H+ se lie davantage par rapport à OH-, une charge positive se développe. A fort pH, une capacité d’échange cationique (CEC) se développe: Les OH- se lient davantage que H+ et une charge négative se développe (Fig. 4.5cd). A l’équilibre ou “ au point de charge zéro ” (ZPC), il n’existe pas de capacité d’échange (Fig. 4.6).

(c)At low pH:MOH + H += MOH 2+(d) At highpH: MOH + OH-= MO-+ H2OFigure 4.5cd – Adsorption à l’équilibre et échange ionique (Schroeder, 2002).

With pH's below the pHZPCthe solidhaswouldhave anionexchange capacity.pH's at the pHZPC,the solid wouldhave no exchange capacity.pH's above the pHZPC,the solid wouldhave cationexchange capacity.

Figure 4.6 – Charge de surface (Schroeder, 2002).

81 Géologie des argiles Chapitre 4 Propriétés

L’étude de la distribution des cations à la surface des particules argileuses est modélisée par la théorie de la double couche. Les modèles expliquent les interactions entre la surface des argiles, les cations interfoliaires, l’eau interfoliaire et les solutions environnantes.

La figure 4.7a présente le modèle de Gouy-Chapman. dans ce modèle, des smectites sont mises en solution. Si la concentration en smectite est faible, les smectites vont se dispersées, l’eau va se troubler et il y aura peu de sédimentation. On obtient une solution colloïdale. Sans eau, les couches T-O-T sont liées par des forces électrostatiques mais en présence d’eau les couches T-O-T sont isolées. Vu la surface négative des argiles, les cations de la solution de la solution vont être attirés par la surface des particules argileuses pour atteindre un nouvel équilibre. La concentration en cation sera plus grande à proximité de la surface des argiles. Un gradient va s’établir et les cations vont avoir tendance à diffuser vers la solution. On atteint une situation d’équilibre dans laquelle il existe une one limitée mais diffuse dans laquelle la concentration en cation diminue avec la distance jusqu’à ce que la concentration égale celle de la solution. Deux couchent s’individualisent: (1) une couche négative à la surface des argiles; (2) une couche positive juste à côté (d’où la notion de “ double couche ”).

L’épaisseur de la double couche dépend de la charge de la surface argileuse et de la salinité. Dans un bècher, il existe une répulsion entre les particules. Si on augmente la concentration en smectites, la diffusion des cations vers la solution est moins prononcée. la couche de Gouy est comprimée et les argiles se rapprochent davantage. Si on augmente encore la concentration en smectite, il peut y avoir une superposition des couches de Gouy et l’attraction électrostatique peut permettre aux particules de s’associer avec éventuellement floculation et sédimentation.

Figure 4.7a – Modèle de distribution des cations adjacents à une surface argileuse :

Modèle de Gouy-Chapman (Eslinger & Peaver, 1988).

82 Géologie des argiles Chapitre 4 Propriétés

Il existe une variation du modèle précédent connu sous le nom de modèle de Stern (Fig. 4.7b). Ce modèle considère que les cations ont des dimensions finies. La charge négative des argiles est compensée par les charges adsorbées dans la couche de Stern et dans la couche diffuse.

Figure 4.7b – Modèle de distribution des cations adjacents à une surface argileuse:

Modèle de Stern (Eslinger & Peaver, 1988).

Capacité d’échange cationique

La capacité d’échange cationique (CEC) mesure la capacité d’une argile à échanger des cations. Elle mesure la concentration en cations non fixés dans la couche diffuse et dépend de la charge totale (i.e., charge de surface et structurale). La CEC est fonction du pH, elle est généralement donnée pour un pH neutre (7). Le principe de la mesure est illustré à la figure 4.8.

Figure 4.8 – Mesure de la CEC (Eslinger & Peaver, 1988).

83 Géologie des argiles Chapitre 4 Propriétés

Un échantillon est saturé avec un cation en le mélangeant dans une solution de chlorures. Les cations qui se trouvaient dans la couche diffuse vont être échangés et seuls les cations ajoutés seront fixés. L’excès de cation est rincé puis remplacé par un autre cation. On mesure ensuite la quantité de cations libérés.

Les valeurs de CEC pour le principales familles argileuses sont reportées dans le tableau 4.3.

Table 4.3 – CEC des minéraux argileux (Eslinger & Peaver, 1988).

84



25/06/2009
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 11 autres membres

design by ksa | kits graphiques by krek